1880-1945
De la Belle époque aux prémices de la "grande accélération"
1880-1945
De la Belle époque aux prémices de la "grande accélération"
La période 1880-1945 correspond à la Seconde Révolution industrielle entre 1880 et 1910, fondée sur l’électricité, le pétrole et la voiture, et ses suites. Elle pose les bases de la « grande accélération » de la seconde moitié du XXe siècle au cours de laquelle les impacts des activités humaines sur l’environnement et le climat ont fortement augmenté.
De 50 000 habitants en 1840, la population du Val-de-Marne est multipliée par 6 entre 1840 et 1880 puis par 20 entre 1880 et 1936 pour atteindre 685 000 habitants. Les 2/3 de ceux-ci vivent en ville. Cet accroissement est lié à l’attractivité de Paris que le territoire contribue à décongestionner.
Sa production industrielle s’intensifie, notamment pendant la Première Guerre mondiale, lorsque le territoire est transformé en véritable arsenal. Sa haute productivité se maintient jusqu’en 1939.
Au début du XXe siècle, la vitesse des trajets s’accélère grâce à l’abandon de la traction animale (5-6 km/h) au profi t de la vapeur (20 km/h) ou de l’électricité (30 km/h).
Les échanges entre le Val-de- Marne et Paris, entre l’agglomération parisienne et les régions plus éloignées, augmentent en fréquence et en tonnage. L’unification du marché alimentaire national, dont Paris est le centre, met en concurrence le Val-de-Marne avec des régions agricoles prospères plus éloignées de la capitale. Ainsi les vergers de Fontenay-sous-Bois et Nogent-sur-Marne souffrent de l’arrivée des fruits du sud, d’Espagne, d’Italie ou encore d’Algérie à partir de 1880. Les vignes val-de-marnaises pâtissent de celle des vins du midi.
En outre elles ne se relèvent pas des maladies sévissant au XIXe siècle, comme l’oïdium et le phylloxéra. La culture de la vigne, symbole de l’autonomie rurale du Val-de-Marne, associée aux guinguettes, voit ainsi sa vigueur disparaître à la fin du XIXe siècle. La dernière vigne de Villeneuve-le-Roi est récoltée en 1928.
Les premières migrations pendulaires témoignant de l’éloignement entre lieu d’habitation et de travail apparaissent avec les premiers trains de banlieue à la fin du siècle. La ligne Vincennes-Bastille compte 12 millions de voyageurs par an à la fin du XIXe siècle.
1. Des progrès sans limites, une histoire des alternatives
"La fée électricité"
L’électricité relève d’un imaginaire alternatif. Elle émerge dans un contexte où la vapeur est critiquée.
Obtenue par la transformation d’une énergie primaire, c’est-à-dire présente dans l’environnement et directement exploitable, le charbon, l’eau ou le vent, l’électricité est un moyen permettant de la transporter plus facilement. Elle est souple, fluide et « propre » en apparence, puisqu’elle brouille le lien entre pollutions et jouissance énergétique en séparant lieux de production et de consommation.
La « houille blanche », à ses débuts, alimente les utopies sociales en semblant offrir la possibilité de déconcentrer les usines, de maintenir le travail à domicile et de ralentir l’exode rural par la production de courant continu à proximité. Mais l’invention du transformateur par Lucien Goulard en 1882 et du courant alternatif par Nikola Tesla en 1888, mettent fin à ces espoirs en permettant de transporter l’énergie à plus grande distance.
Lignes de haute tension et centrales électriques symbolisent l’avènement des grands systèmes techniques. À la veille de la Première Guerre mondiale, plusieurs sociétés se partagent la production et la distribution de l’électricité dans le Val-de-Marne. La centrale d’Alfortville est la principale usine de la société Est-Lumière qui dessert Bonneuil-sur-Marne, Charenton-le-Pont, Gentilly, Ivry-sur-Seine.
La centrale électrique d'Alfortville
La centrale électrique d’Alfortville a été construite en 1901 pour le compte de la compagnie Est-Lumière. Ses deux halles sont implantées parallèlement à la Seine comme celle de Vitry-sur-Seine qui alimentait les tramways de l’est parisien, reprenant elle-même le plan de l’usine des eaux de Vitry de 1883. Dans un des ateliers, des machines à vapeur actionnent les alternateurs, dans le second prennent place les générateurs. En 1913, le département de la Seine regroupe plus de 47% des machines à vapeur produisant de l’électricité en France. En 1922 est construite la centrale de Gennevilliers, destinée à remplacer quatre usines de la banlieue parisienne dont Alfortville. En 1927, les bâtiments de la centrale alfortvillaise sont vendus à la fabrique de papier Catel et Farcy avant d’être démolis en 1986.
Saint-Maurice : le halage. 1910. Carte postale. 13,5 x 9 cm. Archives départementales du Val-de-Marne, 2Fi Saint-Maurice 271
Des mobilités "douces" d'hier (et de demain ?)
Au début du XXe siècle coexistent différents modes de transport parmi lesquels plusieurs n’utilisant ni charbon ni pétrole, donc non carbonés, qu’on qualifierait aujourd’hui de « mobilités douces ».
L’usage du vélo se popularise. Le vélocipède, loisir élégant célébré par Alfred Jarry, sport associé aux fêtes municipales val-de-marnaises à la fin du XIXe siècle comme la fête champêtre du Petit Bonneuil en 1903 ou la fête sportive d’Alfortville en 1910, instrument de liberté au nom évocateur (inspiré de « véloce »), devient compagnon de randonnée ou véhicule du quotidien au tournant du siècle. Il envahit les routes et trottoirs du Val-de-Marne où des pistes cyclables apparaissent.
Le réseau des lignes de tramway s’étend dans le département de la Seine entre 1855 et 1920. Réparti le long des axes fluviaux et du bois de Vincennes, il a une vocation touristique. Il suit les innovations techniques de son temps : d’abord à traction animale, puis à air comprimé selon le système de Louis Mékarsky. Tirant sa puissance de la détente de l’air comprimé, ce système évite les nuisances produites par la vapeur : son moteur n’émet ni fumées, ni gaz polluant. Le réseau est électrifié en 1900. Sous la pression des lobbies de l’industrie automobile, il est démantelé en 1937, remplacé par des autobus. La technologie du moteur à air comprimé est aujourd’hui de nouveau à l’étude des laboratoires tentant de développer des voitures écologiques constituant des alternatives aux voitures électriques.
D'hier à demain découvrez l'évolution du réseau de transport du Val-de-Marne à travers une cartographie dynamique !
Réalisée à partir de fonds d’archives, l'application "Transmobilhist" vous permet de suivre, par une entrée thématique ou chronologique, les mutations des modes de déplacements (tramways, omnibus, bus, métro, RER, vélo, routes…) et la façon dont se structure et se densifie le réseau au regard de l’urbanisation du territoire. Pour aller plus loin, et comprendre l’apparition ou la disparition d’un moyen de transport, la modification d’un tracé, ou la création d’une nouvelle ligne, laissez-vous guider par les nombreux points d’information historique.
Petite histoire des transports !
Découvrez un film réalisé dans le cadre de l'exposition " « Circulez ! Transports et mobilité en Val-de-Marne du XVIIIe siècle à nos jours » et apprenez en plus sur l'évolution du réseau de transport dans le Val-de-Marne.
"1ère étape : Choix des tracés : circuler en étoile ou en rocade".
Le durable n'est plus rentable
Entre 1880 et 1914, les sources d’énergie traditionnelles coexistent avec la vapeur. Ainsi le halage, pratique ancienne de tractage des bateaux au moyen d’une corde tirée par des hommes puis par des chevaux le long du cours d’eau, est autorisé jusqu’en 1932. Preuve qu’en marge de l’essor de la vitesse, lenteur et tradition se maintiennent au début du siècle.
Lorsque la Première Guerre mondiale éclate, le charbon est devenu la première source d’énergie en France et dans le Val-de-Marne. Mais ses pénuries et la hausse de ses prix poussent les industriels et les hommes politiques à se tourner vers d’autres sources d’énergie comme le pétrole. Il est importé de Russie et des États- Unis à partir de 1915, même si quelques faibles gisements d’hydrocarbures (pétrole et gaz naturels) sont découverts en France dans le Jura et le Dauphiné, des puits sont également exploités en Algérie à partir de 1914 et au Maroc après 1917. Durant la guerre, il sert au transport par camion qui supplante le train. Le pétrole sort gagnant de la Première
Guerre mondiale. Les « forces naturelles » (éoliennes, hydrauliques, animales) sont progressivement marginalisées, n’étant pas aussi productives que les combustibles fossiles. Cependant, elles perdurent dans certains domaines comme dans l’agriculture, jusqu’à la mécanisation du secteur, réalisée avec les crédits du plan Marshall de 1947.
2. Mythe du " risque zéro " à l'ère du Progrès
Des risque aux catastrophes
Le progrès et la catastrophe sont l’avers et le revers d’une même médaille.
Hannah Arendt
Paradoxe de la modernité : à mesure que le bien-être de tous s’accroît, la possibilité qu’un accident survienne augmente. L’accident est un événement imprévisible pouvant affecter la vie ou la santé des individus, le risque : la probabilité de la survenue d’un accident.
Pression démographique et étalement urbain poussent de nombreux Val-de-Marnais à s’installer sur des terrains inondables et à proximité d’établissements dangereux et incommodes, construits à l’origine loin des habitations. Salpêtrières, gazomètres (contenant un réservoir de liquides inflammables), machines à vapeur, usines d’engrais dont les substances sont aussi utilisées dans la fabrication d’explosifs, présentent des risques dits technologiques.
L’explosion d’une fabrique de vinaigre et des établissements Desmarais à Ivry-sur-Seine en 1910, l’incendie de la centrale électrique de Vitry-sur-Seine en 1911 causent des dégâts d’ampleur relayés par les journaux. L’installation d’une usine de munitions à Arcueil pendant la Première Guerre mondiale continue à susciter de vives critiques de la part de la population.
Les accidents sont fréquents dans l’industrie. En 1884, un enfant de quatorze ans meurt d’un accident de travail à Arcueil. Employé dans une usine de teinturerie, il a deux doigts écrasés par l’engrenage et meurt des suites de cette blessure.
La société Desmarais Frères
Créée en 1861, la Société Desmarais Frères vend des huiles végétales avant de devenir un des principaux pétroliers de France. Elle établit un dépôt à Ivry en 1889 et fusionne avec Total en 1965 qui démantèle le site en 2006. Son histoire est marquée par plusieurs incendies : vêtements imbibés d’employées prenant feu pendant leur pause en 1902, accident causé par quatre enfants maîtrisé 7h après son déclenchement en 1907, embrasement d’un bateau-réservoir stationnant devant l’usine en 1909.
Dompter les fleuves et contenir les risques de crue
Situé à la confluence de la Seine et de la Marne, le territoire du Val-de-Marne est particulièrement exposé au risque de crue. Il connaît plusieurs inondations centennales au cours des XIXe et XXe siècles en 1856 (6,37 m), 1876 (6,59 m), 1910 (8,52 m), 1924 (7,32 m) et 1955 (7,12 m).
Entre toutes, la crue de 1910 a fortement imprégné les mémoires. Entre le 28 janvier et le 8 mars 1910 la vie s’arrête. Déplacements, eau potable et électricité sont coupés. Le niveau de l’eau est tel que l’accès aux habitations se fait par le premier étage. Les égouts débordent, l’eau emporte 30 000 maisons. Elle fait rouiller les métaux, pourrir les bois et les cultures. Les sols sont lessivés par les ordures ménagères et le pétrole échappé des cuves. Il faut plus d’un mois à la Seine pour rentrer dans son lit.
La lutte contre les inondations, confiée aux habitants regroupés en associations dans l’Ancien Régime, est prise en charge par l’État sous le Second Empire. Une échelle et un service d’annonce des crues sont mis en place vers 1874. Sont mis en oeuvre des travaux d’empierrement, reboisement des berges, remblaiement de terrains, le long de la sablière de Choisy-le-Roi en 1911 par exemple, construction de murettes ou rehaussement de bâtiments comme l’usine des eaux d’Alfortville en 1896.
La crue de 1910 en Val-de-Marne. Janvier 1910. Cartes postales. 13,5 x 9 cm. Archives départementales du Val-de-Marne, 2FI Le Perreux-sur-Marne 94
Plongez dans un témoignage sur les inondations de 1910 !
Découvrez, mise en voix, l'extrait d'un témoignage sur les inondation de 1910. (Archives départementales du Val-de-Marne, 2FI Choisy-le-Roi 239).
Plongez dans un rapport sur les aménagements et travaux entrepris pour lutter contre les inondations !
Découvrez, mise en voix, l'extrait d'un rapport de Georges Lemarchand, conseiller général de la Seine en 1924. (Archives départementales du Val-de-Marne, 10J 78)
Découvrez notre fonds de cartes postales sur les inondations de 1910
Découvrez la crue de la Seine en 1910 vue depuis la commune d'Ivry-sur-Seine
Plan des aménagements pour la défense contre les inondations à la confluence de la Seine et de la Marne Décembre 1931 Plan imprimé. 72 x 52 cm (Archives départementales du Val-de-Marne, 3S 1)
Guerres, désinhibition et pollution
Première et Seconde Guerres mondiales sont les premiers conflits à utiliser les ressources de la chimie, de la science et de l’industrie. Les gaz de combat et les munitions larguées qui n’ont pas explosé contaminent massivement faune, flore, terre et eau.
Les destructions comme celle de la gare de Villeneuve Triage en 1944 bouleversent paysages et écosystèmes. Si les pénuries amènent les autorités à restreindre l’usage des ressources pour les civils et à limiter l’activité de certains secteurs polluants, la production industrielle n’en n’est pas moins intensifiée et les contrôles administratifs sur les pollutions assouplis.
Concentrée dans la région parisienne, le nord et l’est du pays étant inaccessibles, celle-ci est réorientée en fonction des besoins militaires. Dédiés aux sports et loisirs de l’élite, automobile et aéronautique, investis par l’armée, se perfectionnent. Ainsi, les automobiles Brasier prospèrent entre 1914 et 1918. Un terrain d’aviation est installé à Orly par les Américains en 1918, qui sera agrandi et tapissé de pistes en ciment en 1940 par les Allemands. L’usage de la voiture et de l’avion se démocratise après les conflits, participant à l’essor des industries pétrolières. Certains composants des gaz de combat sont utilisés comme pesticides après 1945. En cela, la guerre est le terreau de la consommation de masse qui prospère après 1950.
Les automobiles Brasier
Les usines de cycles et automobiles de Georges Richard s’installent à Ivry-sur-Seine en 1897. Leur directeur s’associe à Charles-Henri Brasier en 1902, ingénieur des automobiles Mors, pour produire des voitures innovantes et puissantes, les « Richard Brasier ». Deux années de suite, en 1903 et 1904, c’est au volant d’une de ces voitures que le pilote Léon Théry remporte la coupe de vitesse Gordon-Bennet. Victime d’un accident dans un Paris-Madrid en 1905 Richard laisse l’entreprise à Brasier. Elle perdure jusqu’en 1930.
Pour en savoir plus :
Découvrez l'exposition "Ivry, berceau de l'automobile : les voitures Richard-Brasier (1897-1925)"
Le port militaire de Bonneuil-sur-Marne
Le port militaire de Bonneuil est construit en 1916 à proximité du front de la Marne. Connecté au réseau de l’Est et à la ligne de la Grande ceinture, il permet d’effectuer divers transbordements entre la voie d’eau et la voie ferrée ainsi que des stockages sur terre-pleins. Matériel militaire et charbon y transitent depuis le Havre ou Rouen. Après la guerre, il est converti en port civil, tandis que dans les années 1930 se développe une activité de plaisance autour de la rivière. Réquisitionné par l’armée allemande en 1939, il est reconquis par les Alliés à la fin de la guerre et sert à l’accueil des prisonniers. Le port concentre également une intense activité économique. Dès 1930 Lancia fabrique sur place ses automobiles Augusta à destination du marché français, s’affranchissant ainsi des taxes sur les importations de produits industriels. Une usine d’embouteillage, une entreprise de matériaux de construction, toutes implantées au sein du port, participent à l’attractivité du territoire de Bonneuil.
Bombardement du 10 août 1944, à Créteil
L'aérodrome d'Orly
C’est sur le plateau verdoyant du Longboyau, près d’un ancien relais de Poste où faisaient étape au siècle dernier des voitures hippomobiles, que l’armée américaine installe en 1917 une base aérienne militaire. Centre d’entraînement des pilotes de réserve à partir de 1921, deux grands hangars à dirigeables pour l’aéronautique civile y sont érigés à ce moment. Entre 1930 et 1937, Orly devient un des grands centres français de l’aviation légère et de tourisme. Cette activité réservée à une élite mondaine se popularise à partir de 1938 avec la création de clubs tels que l’aéroclub des transports ou l’aéroclub ou du canton de Sceaux. En juin 1940 il est évacué par les forces militaires françaises qui en avaient pris le contrôle à la déclaration de guerre. Jusqu’à la Libération, l’armée de l’air allemande occupe l’aérodrome. Elle y construit de nombreuses voies de circulation pour la dispersion des appareils en cas de bombardement. En août 1944 des avions américains se posent dans l’aérodrome d’Orly presque intégralement détruit par les Alliés. L’armée américaine l’occupe jusqu’en 1946 et répare les pistes. En 1953, Air France quitte Le Bourget pour s’installer à Orly. Une nouvelle aérogare est construite en 1957 du fait de l’extension du trafic aérien. Fin 1960 l’aéroport d’Orly est le premier d’Europe continentale.
La gare de triage à Villeneuve-Saint-Georges
Dans la nuit du 27 avril 1944 la zone de triage de Villeneuve-Saint-Georges est bombardée par les Alliés. L’un des plus grands sites ferroviaires d’Europe est une cible stratégique dans la reconquête de la France : durant l’Occupation y transitaient depuis l’Allemagne tanks, bombes et munitions. Après le lancement de 1 800 bombes qui causent la mort de 25 civils, dont des enfants, et de 15 cheminots allemands, tout le quartier est détruit. La gare est reconstruite dès 1950.
Pour en savoir plus :
Découvrez l'exposition "Ivry bombardée : Hiver 1943 / Été 1944"
3. Un territoire en transition, entre ruralité et urbanisation
Habiter en périphérie de la capitale
Le Val-de-Marne connaît un mouvement d’urbanisation qui le transforme partiellement en banlieue aux fonctions résidentielles dès le Second Empire. Entre 1871 et 1914 sont construits un quart des logements du territoire : immeubles de rapport, lotissements, logements ouvriers, cité-jardin.
À proximité des industries sont érigés après 1880 des immeubles ouvriers d’un, deux ou trois étages au confort spartiate généralement sans eau courante ni sanitaire.
Entre 1880 et les années 30, territoires non viabilisés, bois, champs, anciens parcs des demeures aristocratiques sont découpés par des lotisseurs, comme le château de Vitry-sur-Seine dépecé en 1903, et vendu à des propriétaires individuels : ce sont les lotissements. Avant la Première Guerre mondiale, ils sont le fait de populations aisées, après ils sont plutôt l’apanage d’ouvriers et employés s’endettant pour bâtir leur logement et se contentant parfois de bicoques en matériaux hétéroclites. Des associations syndicales de lotissements obtiennent qu’ils soient équipés d’eau, d’électricité, d’une voirie et de réseaux d’assainissement. Le flot de lotissements alimente un mouvement d’urbanisation désordonné.
Dans l’entre-deux-guerres, des Offices public d’habitation à bon marché bâtissent des logements à Vitry-sur-Seine, Ivry-sur-Seine, Orly. À Arcueil l’Office Publics d’Habitations à Bon Marché construit une cité-jardin comprenant 228 logements en 1921.
Cité H.B.M Marat Robespierre à Ivry-sur-Seine construite entre 1936 et 1939 s.d. Carte postale colorisée. 13,5 x 9 cm. Archives départementales du Val-de-Marne, 2Fi Ivry-sur-Seine 119
La grande accumulation
À partir de 1880, les liens entre ville, industrie et agriculture se distendent. Du fait de l’étalement urbain, de l’amenuisement des surfaces agricoles et de leur éloignement vis-à-vis des villes : les résidus non récupérés par les chiffonniers sont envoyés de plus en plus loin. Ils transitent en train jusqu’à 100 km de leur lieu de production. Ainsi, le maire d’Arcueil refuse que des tombereaux chargés de détritus venant de Malakoff et Montrouge transitent par sa ville.
Jusqu’en 1920, ingénieurs, hygiénistes tentent d’innover pour poursuivre l’exploitation des déchets urbains. Leur traitement s’industrialise. Broyeuse et incinérateur sont ainsi installés à Vitry-sur-Seine en 1907, puis à Villeneuve-Saint-Georges. Sont récupérés la poudre issue du broyage ainsi que les gaz des combustions utilisés pour produire l’électricité faisant fonctionner l’incinérateur et les tombereaux électriques récupérant les ordures sur la voie publique. Mais ce procédé est rapidement abandonné, car jugé trop lourd et trop coûteux.
Autour des années 1930, déchets et eaux usées deviennent une charge pour la collectivité il ne s’agit plus de les valoriser, mais de les détruire ou de les abandonner. Ils sont jetés dans les cours d’eau, entassés dans des dépotoirs ou décharges aux confins du département de la Seine à Villejuif, Ormesson-sur- Marne, Sucy-en-Brie. Cette pratique s’accélère à partir de 1945.
La vie dans la zone !
Découvrez un film sur l'habitat insalubre et le début de la construction des H.B.M au Kremlin-Bicêtre !
"La biscaille. Vie dans la zone (1935)". Archives départementales du Val-de-Marne, 4AV 268
Les ordures ménagères au XXe siècle
Découvrez, mises en voix, des extraits variés de documents d'archives (pétitions, délibérations, discours, article de presse, etc.).
Une nature revigorante et l'avénement des loisirs
Au XIXe siècle les rythmes sociaux des Val-de-Marnais évoluent avec l’industrialisation du territoire. Le développement de l’usine et du travail ouvrier inaugurent une coupure franche entre temps travaillé, calculé et temps vide à occuper. La loi de 1906 instaurant un jour de repos par semaine, l’essor des transports collectifs (train, tramway, omnibus) et de réductions tarifaires entre 1890 et 1930, favorisent l’afflux de citadins en Val-de-Marne et la valorisation touristique de son territoire pittoresque.
Une floraison de clubs sportifs organise les loisirs des travailleurs. La société nautique de la Marne est fondée en 1876, suivie de sociétés d’athlétisme ou de gymnastique vers 1900. Les loisirs sportifs participent à la lutte contre l’oisiveté propice au délabrement moral des travailleurs et à la sédition. Ils ont vocation à les éduquer collectivement, leur inculquant discipline, modération et endurance. À partir de 1919 la journée de travail passe de 10 à 8h, en 1936 le Front Populaire instaure les congés payés, les temps libre et de loisir s’accroissent.
Territoire dont l’eau et la ruralité fondent l’attrait touristique, le Val-de-Marne est également célébré pour son air pur. Des établissements de soin proposent des cures d’air au début du XXe siècle, comme le sanatorium de Chevilly-Larue pour la convalescence des femmes malades.
Conclusion
Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, le Val-de-Marne a changé de visage. L’Occupation, les destructions liées aux combats et aux bombardements laissent une économie marquée par le rationnement, une pénurie massive de logements et l’usure de l’appareil productif.
Puis vient le temps de la Reconstruction et le territoire se relève il reprend ses caractères d’avant-guerre, avant de poursuivre la trajectoire techniciste orientée vers la croissance amorcée au XIXe siècle.
Ainsi entre 1780 et 1945, le territoire du Val-de-Marne passe d’un espace rural appuyé sur une économie agricole à un territoire urbain, industriel dépendant vis-à-vis des énergies fossiles. Ce passage s’accompagne d’une mise en danger de l’intégrité écologique de la planète. Cette évolution non linéaire et parfois contestée, critiquée par ses contemporains reflète les orientations idéologiques, techniques et économiques qui ont triomphé à l’ère du Progrès et dont la logique perdure jusqu’à nos jours. Ces choix sont responsables de l’avènement d’un réchauffement climatique d’origine humaine.
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Crédits
L'équipe de l'exposition virtuelle
Direction : Rosine Lheureux
Pilotage : Rosine Lheureux et Zoï Kyritsopoulos
Conception et réalisation (d'après les textes et le graphisme du catalogue de l'expositon) : Julia Moro et Cédric Desbarbès
L’équipe de l'exposition
Direction : Rosine Lheureux
Pilotage : Rosine Lheureux et Zoï Kyritsopoulos
Commissariat de l’exposition : Élodie Belkoff accompagnée de Mélanie Canty
Textes de l’exposition et du catalogue : Élodie Belkoff
Réalisation de la version virtuelle de l'exposition : Julia Moro et Cédric Desbarbès
Application cartographique :
Conception et réalisation scientifique : Mélanie Canty et Julia Moro.
Conception et réalisation technique : Jeannie Marchand (Service de l’Information géographie et Cartographie/ Direction de l’Aménagement et Développement Territorial) et Mathilde Bayle (sigec/dadt)
Conception et réalisation des vues à 360° : Cédric Desbarbès et Julia Moro
Réalisation des enregistrements sonores : Cédric Desbarbès
Les voix utilisées pour les enregistrements sonores ont été réalisées par les agents des Archives départementales : Kamel Amichi, Eric Bernard, Mélanie Canty,Thierry Casamayor, Cédric Desbarbès, Eric Jingeaux, Rosine Lheureux, Camille Malandain et Sylvie Mercieca.
Exposition à 360° : Cédric Desbarbès et Julia Moro
Suivi du partenariat à la Délégation du Développement Durable : Lucia Magnaud
Animation vidéo :
Scénario : Mélanie Canty,
Réalisation : Thierry Casamayor
Carte introductive :
Conception : Zoï Kyritsopoulos
Réalisation : Jeannie Marchand (sigec/dadt) et Catherine Bonnadier (sigec/dadt)
Prises de vue : Fabienne Marié-Maillet
Régie des oeuvres : Camille Malandain
Graphisme et impression de l'exposition
Scénographie : Agence Métaphore{s – François Payet
Conception graphique communication et signalétique : Caroline Pauchant
Conception et réalisation graphique du catalogue : Caroline Pauchant et Hartland Villa
Encadrement : Atelier des 4 vents
Impression et pose de la signalétique : Expograph – Jérôme Rozet
Impression du catalogue : Grenier
Crédits photographiques
Archives départementales du Val-de-Marne, Archives municipales d’Ivry-sur-Seine, Musée de Nogent-sur-Marne, Météo-France, l’Académie des sciences.