1780-1830

La société Val-de-Marnaise de la fin du XVIIIe siècle, une société écologique ?

1780-1830

 

Sans être écologique au sens actuel du terme, la population de l’actuel Val-de-Marne est, dans l’Ancien Régime, en étroite interaction avec son milieu. Par son économie de vie, relativement peu invasive, elle contribue au maintien de son équilibre. Essentiellement rurale, constituée de 28 000 personnes, soit l’équivalent de la population actuelle de Villiers-sur-Marne, la majorité de ses habitants a un mode de vie économe par nécessité. Elle produit des déchets réutilisés en grande partie et mobilise des forces motrices ne consumant pas de ressources fossiles non renouvelables. 

 

Tannerie, industrie textile (dessuintage des laines, rouissage du chanvre et du lin), usines à feu, industrie papetière, fonderie de suifs rejetées en périphérie des villes et de Paris font dès le XVIIIe siècle partie du paysage val-de-marnais. Ils suscitent miasmes putrides, fumées carbonées, corrosion des sols, eutrophisation des cours d’eau. Dans le contexte de la naissance de l’hygiène et de la salubrité publique, odeurs pestilentielles et vapeurs sont perçues comme contaminant l’atmosphère, les corps des animaux et des hommes. 

 

À ce titre, ces ateliers sont fréquemment dénoncés par les riverains et réprimés par les polices locales. Même s’il n’est jamais question de protéger la nature pour elle-même. Pourtant, au même moment, les Maîtrises des Eaux et forêts et leurs relais locaux réglementent l’accès aux bois déclarés « inaliénables » en 1790, leur protection s’appliquant aux arbres ainsi qu’aux animaux. Ces garennes sont prisées par les seigneurs pour la chasse. Leurs arbres sont utilisés comme matière première pour la marine ou combustibles pour le développement des manufactures comme celles de Saint-Maur* ou Vincennes. De prélèvements en déboisement, le pas est vite franchi alors que les besoins de l’industrie s’accélèrent. Des savants étudient les conséquences de ce phénomène. Bernardin de Saint-Pierre développe en 1783 la théorie de la dessiccation : les déboisements assèchent l’air de l’atmosphère et altèrent la qualité de son sol. Il pose ainsi les bases de l’écologie* et achève de nous convaincre de l’ancienneté de la prise de conscience des effets de l’action humaine sur l’environnement. 

 

* Nous restituons les toponymes anciens des villes du Val-de-Marne, contemporains des périodes évoquées. L’actuelle Saint-Maur-des-Fossés s’appelle Saint-Maur au XVIIIe siècle.
** « Science des relations de l’organisme avec l’environnement » Ernst Haeckel, 1866.

Diapo (2021-09-22 14:46:52)